J’ai 13 ans je voudrais faire des fouilles ; comment faire pour devenir une archéologue ?

ETUDIANTS
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"J’ai 13 ans je voudrais faire des fouilles ; comment faire pour devenir une archéologue ?"

Bonjour Patricia, Tu as 13 ans, tu es en quatrième, tu as de l'avance, tu sembles donc une bonne élève, c'est plutôt bon signe pour toi. Mais je dois te préciser que c'est devenu malheureusement assez difficile pour une personne mineure de participer à un chantier archéologique professionnel. Néanmoins tu peux  passer une journée ou davantage sur un chantier de ta région avec l'autorisation de tes parents . Visiter une fouille est la première démarche à faire pour convaincre un archéologue de ton intérêt pour l'archéologie.

Devenir archéologie exige beaucoup de connaissances dans de nombreux domaines. La plupart des gens pensent toujours qu’il faut beaucoup de patience, car pour eux la fouille constitue la principale activité de l’archéologue. En réalité, même s’il s’agit de l’activité la plus importante, ce n’est pas celle qui demande le plus de temps, ni le plus de patience. Fouiller est un exercice agréable quand les conditions météorologiques sont bonnes et que le temps ne presse pas trop. L'ambiance sur les chantiers de fouille, surtout quand les équipes sont jeunes, est remarquable et beaucoup de jeunes gens se sont forgés de riches souvenirs sur les chantiers programmés, où l'on rencontre toutes sortes de gens. Les chantiers mélangent les générations et les expériences des uns et des autres sont complémentaires. Ce sont parfois de très bon moments, même en contexte professionnel, et l'on se fait de longues et solides amitiés.

Mais, tout se complique après, lorsqu’il faut étudier le résultat des fouilles. Trier, dessiner, inventorier, ranger les objets, les échantillons, les documents de fouille, effectuer de longues analyses des relevés, des vestiges de toutes sortes, comparer ses résultats à d’autres résultats, consulter des dizaines ou des centaines de références dans des articles, discuter de tout cela avec les spécialistes, les membres de l’équipe de fouille, faire un rapport et prépare une publication ou une communication dans un colloque scientifique, prend un temps infini. Là, oui, il faut une réelle patience et une volonté inébranlable d’aboutir.

Devenir archéologue exige d’avoir beaucoup lu, d'articles, d'ouvrages. Ce métier demande une très bonne maîtrise de l'écriture ainsi qu'un goût pour les sciences et la recherche. C'est un métier à la fois littéraire (car on réfléchi sur les sociétés passées, l'organisation économique et sociale des peuples disparus), scientifique (car on se pose les bonnes questions et on raisonne comme un scientifique, de plus l'archéologue a besoin de l'aide de nombre sciences pour répondre à ses questions, enfin c'est un métier d'ingénieur car il faut savoir fouiller, organiser des chantiers, faire de bon choix stratégique au moment des fouilles et diriger des équipes parfois importantes. 

Il y a plusieurs compétences en archéologie: chercheur (celui qui a un programme de recherche), Ingénieur (quand il faut mettre en place ou diriger une fouille), technicien (sous la direction d'un responsable de chantier), spécialiste (qui étudie le silex, la poterie, la nature des sols ou des roches, les graines, les charbons, etc...). Les archéologues sont généralistes (ils étudient toutes les périodes) ou spécialisés (en préhistoire, antiquité, Moyen-Age, Egyptologue, époque moderne, architecture, zoologie, botanique, céramique, etc.). Certains ont aussi choisi d'assurer le suivi administratif des fouilles ou de la recherche et dirigent moins souvent des fouilles. Généralement, tous ces archéologues appartenant à diverses branches et métiers sont réunis au sein d'équipes de recherche. Les Unité Mixtes de Recherches (UMR) les Programmes collectifs de recherches (PCR), les Unité de Formation de Recherches (UFR) sont des équipes de cette sorte. La plupart des archéologues (chercheurs, ingénieurs, techniciens) de tous horizons du Languedoc sont ainsi rassemblés dans l'UMR 5140 de Lattes.

Les archéologues français travaillent en France, mais ont aussi des missions à l'étranger (en Egypte, en Asie, en Afrique de l'Ouest par exemple) et  peuvent enseigner. Il y a deux principales sortes d'archéologies : l'archéologie de sauvetage que l'on appelle préventive qui sert à sauver très vite des sites qui vont être détruits par des travaux comme un lotissement, une autoroute ou une ligne TGV..., et une archéologie programmée où un chercheur choisi un site qui va alimenter sa recherche sans qu'aucune urgence ne le presse de finir sa fouille (certains chantiers ont ainsi duré pendant toute une carrière d'archéologue). Dans le premier cas, les fouilles sont financées par les constructeurs (la SNCF, l'Etat, les aménageurs), dans le second cas par l'Etat (qui a hélas de moins en moins de moyens)  Il existe aussi des associations qui regroupent des archéologues amateurs et professionnels. Elles ont des activités de fouilles, de prospections au sol, de mise en valeur de sites archéologiques ou d'animation. 

Il existe des archéologues au Ministère de la Culture, à l'Université, dans les Musées, dans les collectivités territoriales (communes, départements, régions, agglomérations, communautés de communes). Il existe aussi des centres de recherche publics comme le CNRS (Centre National de la Recherche scientifique),  l’INRAP (Institut national de recherches en archéologie préventive qui emploi à lui seul environ 2000 archéologues dans toute la France ; c’est le plus gros employeur), l'IRD (Institut de recherche pour le développement). Depuis quelques années des entreprises privées (une quinzaine en France) sont agrées pour réaliser des fouilles préventives ; d’autres sont des sociétés spécialisées (analyses, relevés de bâti,…) ou des bureaux d’étude. A l’étranger, les archéologues de différents organismes se voient confiés des missions par le Ministère des Affaires étrangères, l’IRD ou l’ONU (archéologues de l’UNESCO), Institut français d'archéologie du Caire, Ecole française d'Athènes, etc... .(voir sur wikipedia)

Pour être technicien, il faut au moins une licence (3 années après le bac) ou alors avoir une bonne expérience de fouilles (mais le bac est nécessaire). Pour diriger une fouille en tant que professionnel un master est nécessaire. Pour être chercheur au CNRS ou à l'Université, il faut avoir soutenu une thèse (7 ans après le bac) et prouvé ses compétences. Ailleurs, les compétences parfois davantage que le diplôme sont appréciées. Les principales universités de France assurent des formations dans tous les domaines de l'archéologie. A Montpellier, il existe une licence histoire de l'art et archéologie, deux masters de recherche et un master professionnel (pour devenir archéologue préventif). Attention la sélection est sévère! : à Montpellier 400 étudiants en histoire de l'art et archéologie en première année de Licence, plus que cinquante à soixante en troisième année et une trentaine en dernière année de Master (5 ans après); une douzaine en thèse. Il faut savoir que beaucoup d'étudiants qui commencent ces études n'ont pas le niveau suffisant (en rédaction surtout), ni le goût de l'effort et ne sont pas faits pour les études longues. Ces dernières années l'université de Montpellier 3 s'est cependant efforcée d'améliorer leur formation et leur réussite à l'issue de la première année.Il est également possible d'étudier l'archéologie dans les grandes écoles comme l'[[Institut national du patrimoine (France), l'Ecole du Louvre, le Collège de France, l'École des hautes études en sciences sociales ou le Muséum national d'histoire naturelle à Paris.

Au niveau du Lycée, peu importe l'orientation, littéraire ou scientifique, il faut surtout être bon en français (car il faut écrire des articles et surtout d'innombrables rapports), avoir un goût pour la lecture et posséder des connaissances scientifiques de base bien assimilées, être également bon en langue (car il faut lire ou écrire des langues étrangères) et surtout posséder une grande curiosité et de l'imagination, deux qualités indispensables pour faire un grand archéologue.

Il y a peu de débouchés mais pas moins qu'ailleurs par les temps actuels. On compte environ 4000 archéologues professionnels en France et les salaires sont très variables, du Smig  à  2 ou 3 fois le Smig (rares sont les archéologues payés davantage). Le salaire brut d'un archéologue débutant en CDD est variable ; il dépasse rarement 1 700 euros brut (1300-1400 net). Le salaire évolue selon les responsabilités exercées et l’employeur (les rémunérations du secteur privé et des établissements publics sont les plus élevées ; les universitaires et les archéologues de collectivité sont parmi les moins bien payés). En archéologie préventive, la carrière commence très souvent par un ou plusieurs contrats de technicien, quels que soient les diplômes obtenus. Les emplois sous contrat a duré déterminée sont assez nombreux dans un métier qui reste difficile à pratiquer. La précarité est encore très importante, malgré les pressions très fortes des organisations professionnelles pour titulariser le plus grand nombre. 

L’archéologie fut pendant longtemps militante ; les archéologues - ceux de l’Association pour les Fouilles archéologiques nationales, l’Afan -  furent très présents pour défendre les droits des personnels et la sauvegarde du patrimoine archéologique contre les intérêts des sociétés d’aménagement et de certains élus locaux influents opposés aux recherches archéologiques. L’action des archéologues de l’Afan relayant celle de nombreux fonctionnaires de l’Etat et l'appui du gouvernement de l'époque, a permis de promulguer en 2001 une loi essentielle pour la protection du patrimoine archéologique français. Après plusieurs tripatouillages cette loi a perdu une grande partie de son impact.

Aujourd’hui, ce goût pour la défense de l’archéologie s’est un peu endormi, même si l’on fouille de plus en plus et si le nombre d’archéologue ne cesse d’augmenter malgré une crise économique qui se reproduit depuis près de trente ans. Néanmoins, les besoins dans notre pays sont énormes, car on a jamais autant détruit de sites archéologiques. Dommage que les pouvoirs publics ne se mobilisent pas davantage pour sauver le patrimoine commun de tous les Français. Au Japon par exemple, il y a 5 fois plus d'archéologues qu'en France et l'Etat japonais consacre un budget 10 fois plus élevé que le nôtre à l'archéologie.

Archéologue: un métier exigeant et difficile? Obtenir un contrat à durée indéterminée peut être en effet long. Mais rien n'est impossible : je n'ai jamais connu un étudiant vraiment accroché par l'archéologie qui ne réussisse pas à en faire son métier. Et franchement, le jeu en vaut vraiment la chandelle, car c'est une vie passionnante et un privilège rare que d'être confronté à la vie de nos ancêtres et aux mondes oubliés du passé!